Enchanteresses, envoûteuses... ce ne sont pas les mots qui manquent pour désigner les sorcières. Mais contrairement aux idées reçues, la sorcellerie n'est pas réservée à la seule gent féminine. L'histoire a retenue les noms de maintes de ces adeptes de la magie noire ou de la magie blanche. Ils sont restés dans les anales pour avoir été accusés de sorcellerie par ceux qui, poussé par la peur, la méchanceté ou le fanatisme religieux, désiraient les voir jugés pour magie, châtiés et même exécutés.
Voici quelques célèbres saints « possédés » par le diable.
Albert le Grand
(1193-1280)
Albert le Grand
Religieux de l'ordre des Dominicains, philosophe, théologien, chimiste et naturaliste allemand, Albert von Bollstaedt est originaire de Cologne. Il a écrit le célèbre recueil de recettes magiques « Secrets merveilleux de la magie naturelle et cabalistique du Petit Albert ». Ces recettes magiques sont basées sur les vertus des herbes, des pierres précieuses ou des animaux. De nombreuses personnes l'ont suspectées de s'être livré à l'art alchimique sous le couvert de la religion. Il fut également le maître de Saint Thomas d'Aquin.
Saint Albert le Grand sera béatifié en 1622, mais ne sera canonisé qu'en 1931 par Pie IX.
Gilles de Laval, Baron de Rais
(1404-1440)
Gilles de Rais
Gilles de Rais, dit Barbe Bleue, épouse Catherine de Thouars et, par cette union, devient Seigneur de Tiffauges. C'était un baron français qui passait pour le noble le plus riche d'Europe. Compagnon de Jeanne d'Arc, il est nommé Maréchal de France par Charles VII.
Il a été accusé d'être un pervers sexuel ayant assassiné de jeunes garçons lors de rituels sataniques. Il aurait également pratiqué la magie noire dans l'espoir de recouvrer une fortune dilapidée. Il mourut à Nantes sur le bûcher et ses propriétés furent partagées entre ses ennemis.
Jeanne d'Arc
(1412-1431)
Jeanne d'Arc
On la mentionne souvent dans les ouvrages de sorcellerie, mais pour beaucoup, elle n'est absolument pas une sorcière. La théorie affirmant que Jeanne était une sorcière, s'appuie sur le fait qu'elle était originaire de Lorraine, province réputée pour la sorcellerie, la magie et le paganisme, qu'elle entendit pour la première fois des voix au pied de l'arbre enchanté de Bourlemont, qu'elle possédait le don de guérir les malades, que ses partisans l'adoraient presque comme une Déesse. Après sa mort sur le bûcher, le bruit courut qu'elle était toujours vivante. Capturée par les Bourguignons à Compiègne le 23 mai 1430, elle est livrée aux Anglais. Ceux-ci lui intentent un procès en sorcellerie. Le procès se déroule à Rouen à huis-clos sous la conduite de l'évêque Cauchon du 9 janvier au 28 mars 1431. Jeanne est brûlée vive le 30 mai 1431. La révision de son procès commença en 1450. Elle est réhabilitée en 1456, béatifiée en 1909 et canonisée en 1920.
Catherine Monvoisin,
née Deshayes dite la Voisin
(1640-1680)
Catherine Monvoisin
Adepte des pratiques occultes, elle est sage-femme de profession et accessoirement avorteuse. Après la mort de son mari, son amant (un certain Lesage) et un prêtre sataniste (l'abbé Mariette) l'initient à la magie noire. On raconte, à l'époque, que dans le jardin de sa maison, elle a fait édifier un four pour y brûler deux mille foetus et nouveau-nés sacrifiés lors de messes noires, qu'elle fabrique des aphrodisiaques et surtout que nombre de nobles dames viennent lui acheter ses poudres pour se faire aimer...
La Voisin est arrêtée et cite, lors de son procès, les noms de ses clients qui figurent au gotha du Paris de l'époque. Elle est envoyée au bûcher en 1680.
Caroline de Brunswick
(1768-1821)
Caroline de Brunswick
Elle fut l'épouse délaissée du roi d'Angleterre George IV.
Poussée par l'indignation, elle confectionna une figurine en cire à l'effigie de son mari. Elle y planta épingles et épines, puis la fit fondre dans une cheminée du palais.
Urbain Grandier
(1590-1634)
Urbain Grandier
1620, couvent des Ursulines de Loudun. Urbain Grandier, à l'époque curé de Saint-Pierre-du-Marché et chanoine prébendier de Sainte-Croix de Loudun, se vit proposer la direction de conscience des soeurs du monastère par Jeanne des Anges. Bon orateur, ce prêtre eut quelques ennuis avec la hiérarchie de l'Eglise car il était davantage porté sur la galanterie que sur la méditation. Grandier refusa la proposition de Jeanne des Anges, malgré les arguments, peu conformes à son état de religieuse, qu'elle avança. Aussitôt, Jeanne des Anges fut atteinte de troubles hystériques et de rêves suggestifs (causés sans doute par le prêtre).
Bientôt d'autres nonnes se mirent à ressentir les mêmes troubles. On fit alors appel au chanoine Mignon, ennemi personnel de Grandier, pour pratiquer plusieurs exorcismes. En quelques mois les démons avaient envahis le lieu saint. Pour Mignon, plus de doutes : Urbain Grandier est l'auteur de ce maléfice. Le conseiller d'Etat Laubardemont, parent de Jeanne des Anges, convaincu de la culpabilité de Grandier, fit sans délai un rapport au cardinal de Richelieu qui ordonna l'arrestation d'Urbain Grandier.
Il fut emprisonné au château d'Angers, puis transféré à Loudun en 1634, dans un cachot aménagé tout spécialement chez le chanoine Mignon, son pire ennemi. Les « confessions » des soeurs envoûtées par Grandier avaient lieu en public. Ainsi, l'exorcisme public du 20 mai 1634 attira deux mille personnes, dont plusieurs centaines de seigneurs, évêques, abbés, magistrats et médecins.
Dans le secret de sa cellule, Urbain Grandier se trouvait exposé aux pires tortures du père Lactance et du Capucin Tranquille. C'est ainsi qu'il avoua avoir passé un pacte avec Léviathan : il lui aurait consacré le coeur d'un enfant sacrifié lors d'un sabbat, mélangé à la cendre d'une hostie calcinée et malaxée avec son propre sperme. Un autre pacte fut mis au jour, par lequel il jura allégeance à Lucifer et renia Dieu, Jésus-Christ et tous les autres Saints et Saintes de l'Eglise apostolique et romaine.
Urbain Grandier fut jugé et condamné le 19 août 1634 et brûlé vif le même jour devant six mille personnes. Comme il avait les jambes brisées, il fut porté au bûcher sur une civière. Avant de mourir, il défia Lactance, lui assurant qu'il comparaîtrait à son tour devant Dieu dans un délai de trente jours . Le prêtre mourut au jour dit, tandis que le Capucin Tranquille s'éteignit, lui aussi, dans d'étranges circonstances.
Après l'exécution d'Urbain Grandier, soeur Jeanne des Anges demeura la proie des démons. Elle eut la révélation en 1638, que les démons la quitteraient si elle accomplissait un pèlerinage sur le tombeau de François de Sales, en Savoie. Ce pèlerinage dura plusieurs mois. A Paris, la religieuse possédée et stigmatisée fur reçue par Richelieu et présentée à la reine d'Autriche qui venait de mettre au monde le futur Louis XIV. Sur demande de la mère, Jeanne des Anges bénit le nouveau-né qui allait devenir le plus grand des rois de France, le roi Soleil... Enfin parvenue en Savoie, Jeanne des Anges posa la main sur la tombe de François de Sales et fut aussitôt libéréeà tout jamais des démons qui l'habitaient depuis sept ans. La religieuse mourut en « Sainte » en 1665.