Dans la mythologie Egyptienne, qui est la plus riche à ce niveau, nous avons le mythe de la barque du soleil. La barque est un élément important dans la vie spirituelle tout comme dans la vie matérielle, avec l’omniprésence du Nil de ses bienfaits et de ses dangers, et les échanges en méditerranée avec les autres peuples. La barque (le bateau) est donc primordiale dans le monde des vivants. Elle l’est aussi dans le monde immatériel, comme miroir : symbole de voyage, elle sert de vaisseau pour la course du soleil disparaissant dans l’océan, puis dans le monde souterrain (image de l’inconscient, qu’il traverse en toute sécurité). Petit détail intéressant : le jour, le soleil navigue dans une barque à voile, alors que la nuit il est installé dans une barque tirée par des animaux. C’est le symbole de l’éternel retour.
Ce même symbole n’est pas réservé au dieu solaire, mais également aux âmes des défunts, d’abord à celle de Pharaon divinisé, puis à toutes les âmes. Dans le culte funéraire, les âmes suivaient le soleil dans des barques identiques à la sienne. Les Textes des Pyramides des 5ème/6ème dynasties fournissent au roi diverses incantations pour se protéger lors de la traversée nocturne. Car traverser, c’est couper un courant, et donc se frotter à des difficultés de navigation mais aussi des dangers symboliques qui figurent le passage d’un état à un autre. "Et voilà que je pagaie dans cette barque, dans les canaux les canaux de Hotep, je pagaie dans ses canaux pour gagner ses villes".
Ces dangers rencontrés par la barque sont aussi présents dans la mythologie grècque et romaine, avec le Styx, qui a un côté terrifiant comme dans le récit d’Homer. Ce fleuve que l’on ne pouvait retraverser s’enroulait neuf fois autour des enfers, avait le pouvoir de rendre immortel. Ou encore bien sûr l’Odyssée et l’errance d’Ulysse.
L’arche de Noé de la bible est là aussi le cocon, l’endroit où l’on attend, la protection contre la colère divine, le "ventre maternel" où l’on attend la résurrection du monde, où l’on attend le passage d’un monde de péchés à un autre. C’est la traversée vers la vie.
Tertullien reprend l’idée des dangers rencontrés par la barque lors de son voyage pour y associer un symbole de l’église (fin 2ème siècle), dans une situation qui rappelle le voyage du Dieu égyptien qui règne à la fin de son voyage sur le monde des morts. "Cette barque préfigurait l’église qui, sur la mer du monde, est secouée par les vagues des persécutions et des tentations tandis que le seigneur (...) semble dormir (...) il maîtrise(ra) le monde et rend(ra) la paix aux siens."
En Mésopotamie, le Dieu-Lune (à cause du calendrier lunaire, le plus important Dieu) a lui aussi sa barque-magur (navire céleste) tout comme chez les Sumériens.
Plus près de nous, aux 17/18ème siècles, de nombreux mythes sur des vaisseaux fantômes dont les âmes de l’équipage sont coincées entre deux mondes pullulent (le plus connu est bien sûr le Hollandais Volant).
Car la barque n’est qu’un moyen, un outil, pour passer d’une rive à l’autre, aller quelque part. Faire le Voyage, dans un abri qui ne vit que pour le transfert.
Et c’est ici que le symbole des deux rives prend toute son importance. Que ce soit du pays des vivants vers celui des morts, deux pays, deux modes de vie, deux civilisations, elle n’aura pas la même utilité. en effet, parfois elle complète le symbole du pont, synonyme de la solidarité et du mélange entre les deux rives. Les deux arcs de cercles (pont + barque) forment une égalité et une harmonie complète.
Les navigateurs qui gardent et manœuvrent ses barques célestes ou souterraines sont assurés d’un sort inégal suivant les civilisations : la vie éternelle, certes (sauf pour Noé), mais aussi une protection pour la barque solaire égyptienne, ou une vie de servitude pour le nocher (Charon) de la barque du Styx à qui l’on devait payer une obole, et de qui il ne faut surtout pas prendre la place.
La Barque funéraire de KhéopsRetrouvée en 1954, sur le plateau de Gizeh, cette barque conçue pour la haute mer a incontestablement une valeur symbolique : 43 m de long sur 6 m de large, et 1,75m de profondeur, elle était démantelée en 1224 morceaux. Il y aurait aussi une seconde barque identique retrouvée à ses côtés mais non présentée au musée de la pyramide de Khéops. Ce serait donc la Barque du dernier voyage du Pharaon.
Le disque céleste et controversé de NebraDatant de 1600 ans avant notre ère, ce disque issu de l’âge du bronze est un témoignage intrigant de la civilisation que l’on croyait "barbare", préfiguratrice des celtes et de leur druides savants. Il pèse environ 2 Kg et a un diamètre de 30 cm environ. Il vient d’Allemagne et a été découvert près de Nebra (d’où son nom).
Il s’agit d’un représentation du ciel (avec des étoiles, la lune et le soleil) tel qu’il était en Allemagne, lors de l’apparition des Pléiades il y a 3600 ans. On y retrouve un arc de 82 degrés représentant "l’écart entre les points de l’horizon où le soleil se lève ou se couche aux solstices d’hiver et d’été à la latitude de la découverte " (source Dinosoria) Ce serait une sorte d’aide mémoire astronomique. De l’autre côté du disque, à l’opposé, un autre arc de cercle qui représenterait soit une barque solaire, soit une barque de navigation, soit la Voie Lactée. Je vous le présente ici car il est contemporain des croyances de l’Egypte Antique, ce qui est très intéressant à noter. En plus je le trouve très beau.