On appelle habituellement "pluies
merveilleuses", des pluies formées d’objets, de végétaux et même
d’animaux ! Ces faits prodigieux, accueillis avec la plus grande réserve
par les scientifiques, ont été signalés depuis l’Antiquité, jusqu’à ces
dernières années.
Dans son ouvrage Le Livre des Damnés
(1919), Charles Fort, journaliste américain, se consacra à ces
phénomènes inexpliqués de pluies de substance gélatineuse, de
boue, de matières végétales, de feuilles mortes – qui tombèrent
une demi-heure durant à Clairvaux en 1794 et durant dix minutes en
Indre-et-Loire, à Autrèche, en avril 1869 -, de lavande –
à Oudon, en Loire-Atlantique, en 1903 -, de carbonate de soude,
d’acide nitrique, de calcaire, de sel, de coke, de cendres, de
serpents, de fourmis, de vers et de boulets de canon, entre
autres.
Charles Berlitz, quant à lui, mentionna dans son livre
des Phénomènes étranges du monde, des déluges d’oiseaux
et même de morceaux de viande saignante !
Violente pluie de poisson à Singapour, en février 1861
Certains de ces phénomènes ont pourtant trouvé une
explication parfaitement rationnelle. C’est le cas notamment de la pluie
de soufre, attestée dès les temps les plus anciens et au Moyen Âge : à
la fin du XVIIè siècle, on comprit que la couleur jaune de cette pluie
venait de ce qu’elle était chargée du pollen des fleurs de certains
arbres, surtout des pins et des sapins. Ce qu’on appelait pluie de laine
désignait simplement une ondée chargée du duvet que produisent les
graines des peupliers et de certains saules. Les pluies de lait, comme
celle qui tomba aux environs de Rome en 234 avant notre ère et celle de
109 qui précéda l’incendie de Rome, "ont été expliquées par l’adjonction
de matières crétacées poussées dans les airs par des tourbillons et
formant alors avec la pluie une eau laiteuse."
Au XIXè siècle,
les spécialistes expliquèrent les prétendues pluies de sang, très
impressionnantes, dont la couleur rouge serait due à la terre, à des
poussières de minéraux ou d’autres matières balayées par les vents, ou
encore à des papillons qui répandaient des gouttes d’un suc rouge. Des
pluies de sang tombèrent ainsi à Lisbonne en 1551 et à Freiberg
(Allemagne), trois ans plus tard. A celle-ci s’ajouta également une
pluie de chair humaine, qui s’expliqua finalement par une chute de
pierres volcaniques ressemblant à de la chair desséchée.
La
pluie de "manne" tient, elle, du miracle : en 371, il tomba en Artois,
alors que les terres étaient stériles, une pluie très grasse avec une
châsse contenant de la laine : "Elle engraissa tellement de terre
qu’elle fut appelée manne, à l’exemple de celle dont Dieu nourrit son
peuple dans le désert." Cette relique est d’ailleurs conservée à
l’église d’Arras où tous les ans une messe célèbre ce prodige.
PLUIES
D'OBJETS Une pluie de croix
tomba en 367 le jour où Julien l’Apostat, "voulant réédifier le temple
de Jérusalem, vit ses efforts impies confondus par le courroux divin.
Ces croix, après avoir sillonné les airs, venaient se fixer sur les
vêtements des spectateurs." Des croix tombèrent également du ciel en
Calabre vers 746, puis en Allemagne en 1503, où elles avaient "la teinte
d’un pain fait de pure fleur de farine."
Selon une croyance
du Moyen Âge, des pluies d’armes se produisaient la nuit aux approches
des grandes guerres. Parmi ces armes se trouvaient des hallebardes, des
épées, très communes, et plus rarement des haches.
Patrice
Walker, chroniqueur écossais, témoigna ainsi : "Pendant le mois de juin
et de juillet dans les environs de Crossford Boat, à deux minutes
au-dessous de Lanarck, et particulièrement à Clyde, un grand nombre de
personnes se rassemblèrent pendant plusieurs soirées. Il y avait là une
pluie de bonnets, de chapeaux, de fusils et de sabres, qui couvraient
les arbres et la terre ; des compagnies d’hommes armés, marchant en bon
ordre sur le bord de l’eau ; des compagnies rencontrant des compagnies,
se traversant les unes les autres, puis tombant à terre et
disparaissant. […] Je m’y rendis trois soirées consécutives et je
remarquai qu’il y avait les deux tiers des spectateurs qui voyaient ce
prodige, et un tiers qui ne le voyait pas. Quoique je ne puisse donc
rien voir, il y avait une telle frayeur et un tel tremblement parmi ceux
qui voyaient que même ceux qui ne voyaient pas pouvaient s’en
apercevoir. […] Ceux qui virent ce prodige, quand ils faisaient un
voyage, voyaient toujours un bonnet et un sabre tomber sur le chemin."
A
l’époque de l’invasion turque, il tomba en Allemagne, comme signe
avant-coureur, des petits turbans, mignonnement ouvragés. La bataille de
Lépante, en 1571, qui "délivra la Chrétienté des armées musulmanes, mit
ainsi fin aux pluies de turban."
Pluie d’argent En 197 de notre ère, une pluie de vif-argent tomba à
Rome sur le forum d’Auguste. L’historien grec Dion Cassius en recueillit
des gouttes et "s’en servit pour frotter une pièce de cuivre et lui
donner l’apparence de l’argent pur, qu’elle conserva intact trois jours
entiers." Le même phénomène se reproduisit sous le règne d’Aurélien au
IIIè siècle.
Pluie de glace et d’icebergs Au printemps 1968, un charpentier allemand qui
travaillait sur un toit fut tué par une chandelle de glace de deux
mètres de long. Un cube de glace échoua également sur une voiture dans
une banlieue de Londres en mars 1974, tandis qu’à Tumberville, en
Virginie (Etats-Unis), en mars 1976, un bloc de glace passa au travers
du toit d’une maison. Un des policiers chargé de récupérer ce curieux
morceau déclara : "En examinant la glace, je l’ai trouvée d’un blanc
laiteux, froide et compressible dans la main." Les physiciens, quant à
eux, conclurent qu’elle ressemblait à de l’eau ordinaire sortant du
robinet.
La théorie développée par les astronomes selon
laquelle la glace pourrait provenir d’un avion ne fit pas l’unanimité :
d’une part, on n’avait entendu aucun avion peu avant la chute, d’autre
part on avait retrouvé dans quelques fragments de glace des morceaux de
gravier. Les météorologistes ne croyaient eux-mêmes pas à cette thèse.
En
revanche, la chute d’un bloc de glace de couleur bleu foncé, pesant
plus de quatre kilos, et qui s’écrasa sur une maison de Shenandoah
(Pennsylvanie) en 1970, était sans doute formée d’un liquide tombé d’un
avion.
Il faut signaler encore que des chutes de blocs de
glace se sont produites bien avant l’invention de l’avion. Ainsi en
1847, à Ord en Ecosse, il y en eut un de près de six mètres de
circonférence. En juillet 1853, un iceberg "volant" s’abattit sur la
ville de Rouen.
En janvier 1860, un navire qui s’approchait du
cap de Bonne-Espérance essuya une violente bourrasque : "Le vent a
subitement tourné de l’est au nord. Pendant la bourrasque, il y eut
trois éclairs de lumière vive, l’un très près du bateau, et au même
moment, une douche de glace est tombée pendant trois minutes. Ce n’était
pas de la grêle, mais des morceaux de glace bien solides, de formes
irrégulières et de différentes dimensions, allant jusqu’à la grosseur de
la moitié d’une brique."
Pluie de pierres Les pluies de pierres ne doivent normalement pas être
interprétées comme extraordinaires : elles sont sans doute constituées
par la chute d’aérolithes ou de corps provenant de l’espace. Mais elles
ont longtemps effrayé la population et ne se comptent plus dans les
archives de pluies fantastiques.
Elles étaient connues de tous
les Anciens, comme en témoignent Tite-Live, Pausanias, Pline et Diodore
entre autres. La plus ancienne chute de pierres connue intervient à
Rome, sous le règne de Tullus Hostilius, après la ruine d’Albe, au VIIè
siècle avant notre ère. Par ailleurs, une pierre unique tombée du ciel
faisait toujours l’objet d’un culte superstitieux et certains
l’utilisaient pour la prophétie. Et c’est sur cette même base de
croyance qu’est fondé le pèlerinage à la Mecque pour les musulmans :
l’adoration d’une pierre unique tombée du ciel, offerte par Mahomet.
La
plus grosse pierre tombée du ciel est celle qu’on retrouva en Alsace, à
Ensisheim en 1492, puisqu’elle pesait environ trois cents livres. Au
début du XVIè siècle, 1 200 pierres environ, dont une pesant cent livres
et une autre soixante, tombèrent en Italie, près de l’Adda.
On
signale également une pluie de pierres tombées au cours d’un orage en
1768 dans le Maine, aux environs du château de Lucé : "Il y eut un coup
de tonnerre qui fut suivit d’un bruit tout à fait semblable au
mugissement d’un bœuf." On retrouva une pierre enfoncée dans la terre
qui était encore brûlante : "Elle pesait sept livres et demie, sa forme
était triangulaire, c’est-à-dire qu’elle présentait trois cornes
arrondies, dont l’une, enfoncée dans le gazon, était de couleur grise,
et les deux autres extrêmement noires. Un morceau de cette pierre fut
examiné par l’Académie royale des sciences. […] Ils reconnurent que
c’était une espèce de pyrite qui n’avait rien de particulier que l’odeur
de foie de soufre qui s’en exhalait pendant sa dissolution par l’acide
marin. Cent graines de cette substance donnèrent par l’analyse huit
grains et demi de soufre, trente-six de fer, et cinquante-cinq et demi
de verre vitrifiable."
En juillet 1790, nouvelle pluie de
pierres à Juillac, dans les Landes. Le 26 avril 1803, à l’Aigle, dans
l’Orne, l’apparition d’un "globe enflammé d’un éclat très brillant qui
se mouvait dans l’atmosphère avec beaucoup de rapidité" fut suivie d’une
forte explosion, puis de la projection, avec un bruit de fusillade et
de sifflements, de 3 000 petites pierres environ, qui se répandirent
dans tous les coins. Les paysans crurent à l’Apocalypse, se jetèrent à
terre et se mirent à prier. Les physiciens de Paris, incrédules, se
décidèrent seulement trois mois plus tard, à étudier le phénomène : ils
conclurent très rapidement à une simple pluie de météores.
Le
27 mai 1819, une grêle violente dévasta la commune de Grignoncourt
(Vosges, région de Neufchâteau) : les grêlons, qui pesaient près de cinq
cents grammes, contenaient une pierre couleur café clair, plate, ronde,
polie et percée en son milieu d’un trou laissant passer le petit doigt.
Ces pierres furent analysées comme étant inconnues dans la région. En
juillet 1825, à la suite d’un violent orage, de nombreuses pierres, de
trente à plus de deux cents cinquante grammes, échouèrent dans les
campagnes environnant Torrecilla de Cameros, en Espagne.
La
pluie d’aérolithe qui tomba en août 1853 sur un village situé à une
vingtaine de kilomètres de Saint-Pol (Pas-de-Calais), et qui causa la
mort de poules et d’oiseaux, avait un caractère absolu et miraculeux :
sur l’une de ces pierres, tombées une fois de plus juste après un orage,
on pouvait voir "un œil ouvert fort bien dessiné ; une autre présentait
le dessin d’une ancre sur fond transparent. Plusieurs autres avaient la
forme de cœurs ou de silhouettes semblables à des statuettes de la
Vierge ; enfin, une dernière, plus merveilleuse encore, offrait l’image
d’un ostensoir d’environ dix centimètres de hauteur, au milieu duquel se
voyait l’image d’une hostie entourée d’une auréole de dentelle
transparente." Le même jour, on recueillit, après un déluge de grêle et
dans une maison de Saint-Pol, un grêlon qui "avait la forme d’une
médaille ; au milieu d’un cercle servant d’encadrement, on distinguait
nettement la figure de la Vierge, dont la tête était couronnée comme une
auréole." Fait extraordinaire, le grêlon était tombé par la cheminée
dans le foyer, "à la même place où l’on avait l’habitude de placer et
d’allumer un cierge à la Vierge." Dans la même ville, on trouva
également un grêlon présentant l’aspect d’une médaille à l’effigie de la
Vierge.
Vers 1880, l’Académie des Sciences décréta que les
météores n’existaient pas et Cuvier affirma qu’il ne pouvait pas tomber
des pierres puisqu’il n’y en avait pas dans le ciel.
PLUIES
DE FRUITS ET DE VEGETAUX Pluie de blé On désignait sous cette appellation des ondées qui
déposaient sur le sol des corps ressemblant à des grains de blé.
Certains ont cru les identifier au siècle dernier : il s’agirait de
tubercules de la renoncule ficaire, ou de graines de mélampyre, de
véroniques ou d’autres plantes, qui auraient été soulevées et
transportées par le vent. De nombreux témoignages évoquent toutefois une
pluie de pur froment qui tomba en mars 1556 sur la ville de Klagenfurt
(Autriche) : cette pluie était "si abondante, que les habitants purent
s’en approvisionner pour vivre un certain temps." En 1886, en
Angleterre, des grêlons renfermaient aussi des grains de blé.
Ce
type d’averse ne serait cependant pas si rare qu’on peut l’imaginer. En
mai 1803, à la suite d’un très violent orage, il tomba donc une pluie
de graines, semblables à des pois, dans la province de Léon (Espagne) :
neuf à dix quintaux de ces graines, très blanches, dures et presque
rondes, furent recueillis. On a supposé que ces graines, dont aucun
botaniste ne reconnut l’espèce et qui n’existeraient pas sur notre
hémisphère, pouvaient avoir été transportées par une trombe d’eau d’une
contrée très éloignée.
En février 1979, lors d’une tempête de
neige, on entendit un bruit de pétarade : on découvrit alors des
graines, qui se révélèrent être des graines de cresson et de moutarde.
"La chose la plus singulière c’est que les graines de cresson étaient
toutes enveloppées d’une gelée. Lorsqu’on plongeait la main dans ces
graines pour les attraper, elles collaient aux doigts sans que l’on
puisse sans débarrasser. Le phénomène se reproduisit cinq à six fois
dans la journée et il tombait à chaque fois de plus en plus de graines.
Ce qui est très étrange, c’est que lorsque les graines rapportées de
chaque jardin se collaient aux chaussures et que l’on marchait dessus,
elles exhalaient toutes un parfum très fort de moutarde et de cresson."
Quelques
jours plus tard, nouvelle pluie constituée cette fois de pois, de maïs,
de haricots et de fèves ; plus de quatre kilos de graines furent ainsi
récoltées en vingt-cinq averses. Aucune explication ne fut trouvée aux
deux phénomènes.
Pluie de noisettes Selon le Symons Monthly Meteorological Magazine, en
1867 se produisit à Dublin une pluie de noisettes "fossiles" : elle
était si violente "que les policiers, pourtant pourvus de casques d’une
résistance exceptionnelle, ont été obligés de chercher un abri pour se
protéger de cette fusillade aérienne."
A Bristol, en mars
1977, un couple qui se trouvait dans la rue reçut une véritable douche
de noisettes (environ quatre cents). Fait très étrange, "non seulement
il n’y avait pas de noisettes ailleurs dans la rue, mais les noisettes
n’auraient pas du être de saison avant les mois de septembre ou
d’octobre, alors que nous étions au mois de mars !" (FAWC). De plus, les
noisettes, qui se révélèrent mûres et très bonnes, étaient tombées d’un
ciel bleu où il n’y avait qu’un seul nuage.
PLUIES
D'ANIMAUX Pluie d’alligators Le phénomène a été signalé aux Etats-Unis en 1877,
rapporté par le New York Times du 26 décembre : "Le Dr J.L. Smith, de
Silverston, en Caroline du Sud, était assis devant sa tente lorsque,
soudain, quelque chose tomba sur le sol et se mit à ramper vers lui. A
l’examen, il apparut que l’objet en question était un alligator.
L’instant d’après un autre tomba de la même façon. Ces apparitions
excitèrent tellement la curiosité du docteur qu’il regarda aux alentours
pour voir s’il n’y en avait pas d’autres. Il en trouva ainsi six autres
dans un rayon de 200 mètres. Les animaux étaient tous bien vivants et
mesuraient environ 30 centimètres. L’endroit où ils sont tombés se
trouve sur une vaste étendue sablonneuse près de la rivière Savannah."
Tandis
qu’un alligator tombait du ciel en 1893 à Charleston, un fait similaire
se reproduisit en mai 1934 : un ballon de la marine américaine, de
retour des Caraïbes, survolait la Californie "lorsque le commandant,
Robert Davis, entendit des bruits sourds au-dessus de sa tête. Intrigué,
il monta au gréage pour examiner un des sacs de ballast. Les coups se
faisant de plus en plus forts, il ouvrit donc un sac de ballast et y
découvrit un alligator de plus de 70 centimètres. L’équipage volait déjà
depuis plusieurs jours et par conséquent, personne n’avait aucune idée
de la provenance soudaine de l’animal, sans que personne, de surcroît,
ne s’aperçoive de sa présence plus tôt. L’équipage s’était déplacé à
bord du ballon depuis le départ et n’avait rien remarqué qui sorte à ce
point de l’ordinaire. Restait une seule explication logique mais pas du
tout sensée en réalité : l’alligator était tombé du ciel."
Une
trentaine d’années plus tard, en 1960, des habitants de Long Beach en
Californie, entendirent un bruit lourd dans leur jardin, suivi d’un
grognement terrible : ils y découvrirent avec stupéfaction un alligator
de près de deux mètres.
Pluie de canards En 1587, en Allemagne, aux environs du château de
Withiz, "une nuée de canards, tombant comme la pluie, s’abattit sur un
étang voisin. Sur ce champ de bataille, ils se livrèrent un combat
acharné, et le lendemain matin les paysans ramassèrent par centaines
ceux qui avaient succombé dans la lutte." En 1933, des canards gelés se
sont écrasés à Worcester dans le Massachusetts (Angleterre).
On
parle également de la chute d’une tortue enrobée de glace dans le
Mississipi en 1894, et d’une pluie de sangsues, toujours aux Etats-Unis,
à une date antérieure à la première moitié du XIXè siècle.
Pluie
de crabes et de bigorneaux
En 1829, à Reigate
(Angleterre), on retrouva quelques crabes après un violent orage. En mai
1881, toujours en Angleterre et à l’occasion d’un orage qui éclata près
de Worcester, on rapporta les mêmes faits et "dans un de ces gros
coquillages ramassés, se trouvait un bernard-l’hermite vivant."
Pluie
de crapauds et de grenouilles Depuis
l’Antiquité, des milliers de témoins auraient vu "ces animaux tomber de
l’atmosphère sous leurs yeux, en auraient reçu sur leur figure et sur
leurs chapeaux." Au siècle dernier, on attribuait encore aux sorcières
les pluies de crapauds et de grenouilles.
Le récit suivant, un
extrait du Monthly Weather Review de mai 1917, est celui d'un
déluge de crapauds tombé en France sur le village de Lalain, en 1794:
«
Il faisait très chaud. Soudain, vers 3 heures de l'après-midi, il tomba
une telle abondance de pluie que 150 hommes de la grande garde furent
obligés de quitter la dépression qu'ils occupaient pour ne pas être
noyés. Mais quelle ne fut par leur surprise de constater qu'avec l'eau
se mettaient à tomber d'innombrables crapauds, de la taille d'une
châtaigne, qui se mirent à sauter dans toutes les directions. La partie
postérieure des crapauds étaient allongée, ils devaient encore être prêt
de l'état de têtard.»
Le même article du Monthly Weather
Review décrit aussi une autre situation vraiment similaire en France,
dans la ville de Poitiers, le 23 juin 1809.
Toujours en France,
on cite le témoignage suivant survenu à Jouy en juin 1833 : "Un orage
nous surprit et je vis tomber du ciel des crapauds ; j’en reçus sur mon
parapluie ; le sol était couvert d’une quantité prodigieuse de crapauds
fort petits qui sautillaient partout. Les gouttes d’eau qui tombaient en
même temps n’étaient guère plus nombreuses que les crapauds."
Certains
ont nié formellement le phénomène, puisque « celui qui peut croire
qu’il pleut des grenouilles croira tout aussi formellement qui peut
pleuvoir des veaux », d’autres tentèrent d’avancer une explication,
comme le physicien Ampère : "Ce savant avait remarqué, et c’est ce que
tous les promeneurs ont pu remarquer aussi, qu’à une époque déterminée,
c’est-à-dire quand les crapauds et les grenouilles viennent de perdre
leur queue, ces animaux éprouvent le besoin d’abandonner le lieu de leur
naissance, et se mettent en effet à courir d’une manière vagabonde, et
par très grandes masses, la campagne. Durant ces promenades, il serait
très possible qu’un coup de vent violent accompagnant les orages,
enlevât sur son passage une certaine quantité de ces animaux, faibles et
légers, pour les rejeter ensuite en d’autres lieux."
Signalons
que pour faire taire ces sceptiques, des observateurs nièrent bien vite
le fait qu’un tourbillon de vent pu aspirer non seulement les
batraciens mais aussi les poissons ou autres animaux : "Premièrement, le
mécanisme transporteur, quelle que soit sa nature, préfère sélectionner
une seule espèce de poisson ou de grenouille ou de l’animal inscrit au
menu du jour. Deuxièmement, la taille est également soigneusement
sélectionnée. Troisièmement, aucun débris, tel que du sable ou des
plantes, ne tombe jamais avec les animaux. Quatrièmement, lorsqu’il
s’agit d’espèces marines, aucun rapport ne signale une chute de pluie
salée. […] L’hypothèse de la trombe marine ou du tourbillon est donc
plus facile à avaler lorsque le poisson transporté voyage habituellement
et en abondance par bancs à la surface des eaux avoisinantes. Mais elle
est moins adaptée aux poissons vivant en eau profonde, parfois sans
tête, et aux animaux qui tombent en quantité énorme."
Au cours
de ce siècle, l’Angleterre subit des averses de batraciens par
centaines, notamment en 1921 à Southgate, au nord de Londres. En 1944,
dans les Midlands, un couple surpris par l’une de ces averses vit la
route se recouvrir en quelques minutes de minuscules reinettes, et, cela
ne s’invente pas, le village où le phénomène se produisit s’appelait
Hopwas, qui signifie "petit bond" ! En décembre 1977, le Sunday Times
mentionna aussi une pluie de grenouilles dans le Sahara marocain.
En
1954, dans un parc de Birmingham, un déluge de grenouilles affola la
population en pleine journée : "Elles tombaient du ciel par centaines,
nos parapluie en était couvert. Nos épaules en étaient pleines. En
regardant en l’air, nous pouvions les voir tomber du ciel comme des
flocons de neige. La terre en était entièrement recouverte sur 50 mètres
carré. Nous avions très peur de les piétiner tant elles étaient
minuscules. Elles mesuraient un centimètre et demi ou deux seulement, et
étaient de couleur kaki avec des petites touches de jaune, exactement
comme si elles venaient de sortir de l’œuf."
En 1969, une
pluie de grenouilles fit l’objet d’un article dans le Sunday Express,
puisque les grenouilles étaient tombées sur la maison d’une des
journalistes, à Penne, dans le Buckinghamshire ; elle apposa son
témoignage en première page et pu prouver ses dires en montrant les deux
petites grenouilles qu’elle avait retrouvé dans le pantalon bouffant
qu’elle portait la veille.
Pluie de poissons Outre-manche, l’un des plus anciens témoignages connus a
été adressé à un membre de la Société royale, en l’an 1666. Par
ailleurs, on en fait très souvent mention en Allemagne, notamment sous
le règne d’Othon III, vers la fin du Xè siècle, où ce phénomène était
réputé annoncer des catastrophes, comme la pluie de poissons qui tomba
en 990 avait précédé l’invasion de la Saxe par les Vandales. En France,
au courant de l’été 1820, les élèves du séminaire de Nantes "virent avec
surprise, à la suite d’un orage pendant lequel ils s’étaient mis à
l’abri, la surface de la campagne couverte sur une étendue de quatre
cents pas d’une multitude de poissons d’un pouce de longueur environ qui
sautillaient dans l’herbe."
Outre-manche toujours, une pluie
d’anguilles des sables se serait abattue en 1918 sur un quartier de
Sunderland et en 1948, une douche de harengs tomba sur quatre golfeurs
près de Bournemouth (Dorset).
D’autres faits similaires se
produisirent outre-Atlantique. En 1819, un hareng de trente-trois
centimètres tomba du ciel à Buffalo et en 1879, c’est une véritable
averse de harengs qui survint dans un cimetière de Sacramento. Une pluie
de poissons eut encore lieu dans le Kansas en 1899. En 1841, Boston
reçut une pluie de poissons, dont un calmar de plus de vingt centimètres
! En octobre 1947, la rue se couvrit en quelques instants de milliers
de poissons à Marksville, en Louisiane : parmi eux, on identifia "des
poissons-lunes, des vairons aux yeux ronds et une perche noire de plus
de vingt centimètres de longueur." En 1957, des poissons s’abattirent
sur une gare en Alabama.
Les pluies de poissons sont très
courantes en Inde et en Australie. Le naturaliste australien Gilbert
Whitley a même fait publier en 1972 dans l’Australian Natural History,
une liste de cinquante pluies de poissons, dont une pluie de milliers
d’épinoches d’eau douce en 1879, de perches naines dans l’Etat de
Victoria en 1933, et une pluie de crevettes en Nouvelles Galles du Sud
quelques années plus tard.
En février 1861, après le
tremblement de terre de Singapour, un déluge s’abattit sur la ville
pendant six jours entiers. Peu après, on vit "une foule de Malais et de
Chinois qui remplissaient leurs paniers de poissons qu’ils ramassaient
dans les flaques d’eau qui recouvraient le sol." Un autre cas survenu en
Inde "fait état du bon usage qui a été fait de cette pluie de poissons,
qui ont été accommodés au curry."